— Mlle Pelletier, vous voulez bien me faire faire une visite rapide de votre appartement ?
       — Oh !  Bien sûr !  Mais  vous  pouvez  m’appeler Lauranne, monsieur le commissaire (elle dit ça en baissant les yeux et en surjouant quelque chose d’indéfinie entre la gosse timide et une vamp du Grand-Guignol)…
       Lespalettes hésite à lui répondre à son tour de façon surjouée mais juge préférable de ne pas se foutre de sa gueule aussi ostensiblement, c’est pourquoi il poursuit d’un ton bienveillant mais sans excès :
       — Pas  commissaire,  simple  commandant  de police… Lauranne. Vous connaissiez la victime depuis longtemps ?
       — Oh là là ! Ça fait au moins (elle réfléchit et compte sur ses doigts en se mordant la lèvre inférieure)… Ben c’est facile ! C’était avant l’année d’avant où je suis allé en vacances chez mon père à Ramatuelle comme tous les mois d’août (elle dit ça en s’illuminant de fierté) ! Ben… ça devait être en juillet de l’an dernier ! Ça fait plus d’un an (elle ponctue son brillant calcul par un battement de cil) !
       — Vous vous êtes rencontrées comment ?
       — (Elle prend  un air gêné pour répondre)  Elle  était passée un soir au Vicomte pour boire un verre, Le Vicomte, vous savez ?, le bar où je travaille… mais il ne faut pas croire tout ce qu’on raconte sur ces endroits, monsieur le commandant ! Moi, je ne suis pas du tout une fille comme ça, je travaille là uniquement pour payer mes études (la fierté ostensible de nouveau après la honte surjouée) ! Parce que ce n’est pas facile la vie, vous savez…